Dans le cadre de la présélection de trois films du GREC aux César 2024 (deux court-métrages de fiction et un court-métrage documentaire), les réalisateur.rices des films se sont prêté.e.s au jeu de présenter leur travail à travers leurs comédien.ne.s.
Voici De la folie des hamsters de Juliette Marrécau, par Anaëlle Fournier et Juliette Savary, comédiennes principales du film.
Voici également un portrait thématique du film par Juliette Marrécau !
Si le film était…
Un animal: un hamster, évidemment
Une couleur: couleur arc-en-ciel ou le refus de choisir une couleur
Un instrument de musique: un piano avec de la pâte à fixe sur les cordes
Un livre (recueil, roman, etc.): Éloge du risque, d’Anne Dufourmantelle
Un vêtement: une fausse fourrure rose
Une confiserie: un arlequin
Un lieu: un salon squatté
Une fleur: un cosmos rose
Un élément: la terre
Un moyen de transport: le car qui part de Bercy
Une figure géométrique: le rond
Un objet: une brosse à dent
Un jour de la semaine: le lundi pour « comme un lundi »
Une saison: l’automne
Un métier: Deratiseur
Un sport: le Feldenkrais
Une planète: Mars
Une odeur: le renfermé
Un sentiment: la solitude
Un jeu: le twister
Un plat: des pâtes au fromage
Une chanson: la composition originale de Pierre Fourchard pour le film
« Aussi grande que l’Everest
j’obéirai au maître
je mettrai la grande veste
pour partir en un geste
complètement à l’Ouest »
Nous avons également demandé aux réalisateur.rices de confectionner une vidéo de présentation de leurs films, dans l'esprit de ceux-ci !
Ils et elle nous ont également accordé une interview et nous racontent leur expérience de prépa et de tournage, leur rapport à leur film et aux thématiques qu'ils y abordent.
Voici la vidéo et l'interview de Juliette Marrécau, réalisatrice de De la folie de hamsters, présélectionné dans la catégorie Meilleur court-métrage de fiction.
Synopsis de “De la folie des hamsters” de Juliette Marrécau :
Quittant son père et sa ville d’enfance, Inès (Anaëlle Fournier), idéaliste et maladroite, fait tout pour convaincre sa soeur (Juliette Savary) de la garder dans son petit appartement parisien. Esseulée et en perte de repères, elle se lie d’amitié avec un hamster, qui ne cesse de tourner en rond...
Interview de Juliette Marrécau
Est-ce qu’il y a une scène dans le film que tu aimes particulièrement ? Qui pour toi se détache du reste ?
Oui, celle qui se passe dans la chambre, quand Inès et Alice (les deux sœurs, personnages principaux, en conflit tout au long du film) se réconcilient. C’est celle que j’ai eu le plus de plaisir à faire, parce que c'est des très longs plans, donc il y avait de la place pour le jeu. Au GREC, on fait des films bénévolement, mais il y a un désir d’apprendre, de prendre le temps de tester des choses. Il y a une grande liberté, très précieuse. Pour cette scène, on a pu la faire, la refaire, dès le casting, en répétition, et au plateau. C’est un vrai cadeau ! C’est une des scènes les plus abouties pour moi. C’est aussi LA scène “d’amour” entre les deux sœurs ! Et il n’y a pas beaucoup d’amour ailleurs dans le film…
Ces deux comédiennes, Anaëlle et Juliette, comment les as-tu rencontrées ?
Dans un casting en grandes pompes ! Le film a pu profiter du partenariat entre le GREC et le CLCF. J’avais une armée d’étudiants pour m’aider à faire le casting, chapeautés par la fabuleuse directrice de casting Maya Serrulla. Ça a duré plus d’une dizaine de jours, ce qui est assez exceptionnel pour un court ! On a rencontré une cinquantaine de comédiennes très talentueuses. C’était fascinant de voir le champ des possibles s’ouvrir avec chacune… Mais quand j’ai vu Anaëlle Fournier, c’était une évidence. Elle correspondait tellement au personnage (Inès) ! Très originale, très libre dans son corps, elle faisait beaucoup de propositions. Je savais que j’allais pouvoir m’amuser et chercher des choses avec elle.
Après il a fallu lui trouver une grande sœur. On a eu beaucoup de chance de trouver Juliette Savary (Alice) ! Je l’avais vu jouer au théâtre et j’avais pensé à elle, parce qu’elle pouvait incarner ce personnage fort, caractériel, mais très vulnérable en même temps. Je voulais qu’on sente qu’elle peut craquer à tout moment, mais que pour l’instant elle tient. Je cherchais pour elle un jeu très fin, très précis, alors que pour Inès, c’était plutôt un bouillonnement, quelque chose qui déborde.
Toutes les deux (Anaelle Fournier et Juliette Savary), elles ont tout de suite matché, elles étaient déjà un peu en train de se disputer quand je suis arrivée en salle de casting, et en même temps elles se marraient, c’était très électrique ! Elles étaient tout de suite comme deux aimants, qui s’attirent ou qui se repoussent, je sais pas (rires).
J’imagine que ton scénario a pas mal bougé après que tu les aies castées ?
Le film s’est construit à partir d’elles. On a fait le découpage à partir des répétitions qu’on a pu faire dans le décor réel puisque c’était chez moi. Ce qu’elles donnaient, c’était vraiment le cœur du processus de création.
Pas mal de choses ont été ajoutées, comme le monologue où Alice explique à sa sœur comment s’en sortir dans la vie. Le scénario était un point de départ, mais on a vraiment déployé les scènes en répétition.
On pouvait se le permettre parce que la structure était très riche, très dense, et on avait fait un gros travail avec Mathilde Cadrot, la co-scénariste, bien avant les répétitions, qui fait que le film tient. On n’a pas enlevé une séquence. Les comédiennes se sont appropriées le texte dans une structure très solide.
Et cette musique qui reste dans la tête, d’où elle vient ?
Quand j’ai appris qu’Anaëlle chantait, je me suis dit qu’elle allait chanter la musique du film. J’avais envie de faire un film très naïf, notamment dans la mise en scène, et de ne pas m’excuser de ça, pour en dégager une grande liberté.
Alors on s’amusait à s’envoyer des vocaux où on chantait n’importe quoi. Ça nous a aussi permis de nous rapprocher, d’oser plus. Et un jour, ce texte est sorti de nos échanges, même si on chantait comme des casseroles (rires). Pierre Fourchard (compositeur) s’est emparé du texte et a amené l’idée d’une comptine, à l’image du hamster qui tourne toujours dans sa roue, un motif de répétition qui est joyeux, enfantin... Et entêtant !
Matthis Goldfain, l’ingénieur du son du film, a installé son studio dans mon salon. Pierre a eu la bonne idée de mettre de la pâte à fixe sur les cordes du piano pour donner cet aspect bric-à-brac. On a fait venir Anaelle et aussi Juliette, qui chante dans la chanson finale. C’était un moment d’amusement, de création entre ami.e.s. Je suis contente que cet amusement existe dans le film et particulièrement dans la chanson.
Le film est anodin dans ce qu’il raconte mais pourtant assez politique. Est-ce que tu as voulu faire un film politique ?
Je pense que c’est pas un film qui s’engage pour une cause ou une autre. C’est un film violent, parce que la vie capitaliste est violente. Quand on fait des courts-métrages, on vit très mal. On doit avoir un boulot à côté, on est souvent au RSA… Donc forcément, le film prend aussi ça en charge. C’est d’abord un film personnel, qui devient politique parce que je suis dans cette situation. Mais je pense que tout bon film est politique. Parce que s'il est personnel, s’il est sincère, alors il est forcément imprégné d’une vision politique plus ou moins centrale.
Et le hamster ? Il a complètement sa place dans le film, mais d’où sort-il ?
Le film, au départ, était très dramatique, et ce n'est pas ce que je voulais pour mon premier film. Je cherchais un ressort de comédie et dans mes recherches sur toutes ces questions de cycle, je suis tombée sur le hamster. J’ai passé des semaines à regarder des documentaires, des Youtubeurs sur les hamsters… Et j’ai trouvé que c’était un animal qui correspondait bien au personnage d’Inès dans sa solitude, dans sa fragilité. Ils ont une vie très rude. Toujours dans la peur de la mort. Toute leur existence, même leur corps, est conditionnée pour qu’ils arrivent à survivre alors qu’ils risquent de se faire manger à tout moment. Un peu comme les planctons dans l’océan. Je trouve ça très intéressant.
Propos recueillis par Mathilde Adjinsoff
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